Rue des Allumettes
par Automnale
Je sais une échoppe, rue des Allumettes,
Avec, en terrasse, un chat roux songeur.
Une mystérieuse porte en bois de Panama gémit.
Des senteurs de thé vert surgissent.
Une femme aimée,
Au regard de menthe complice,
Accueille les voyageurs.
Je sais des rivages, rue des Allumettes,
Souvent j’y musarde, sans laisser d’adresse.
A la Treille Muscate, je rends visite à Colette.
Si je m’attarde en chemin,
Une femme aimée,
Au regard de menthe complice,
Me prend la main.
Elle parle si bien de semelles de vent,
De George Sand, d’un pêcheur d’Islande,
De la cousine Bette.
Avant de bourlinguer avec Cendrars,
Nous courons, sous la pluie, rue de Siam,
Et dans un château breton, nous reçoit un revenant.
N’est-ce pas monsieur de Chateaubriand ?
Elle a pour amis Verlaine, Ronsard,
Un vice-consul, un marin à Gibraltar.
Je suis si fier d’elle, de ses connaissances littéraires.
Quand elle grimpe sur l’escabeau, pour frôler Victor Hugo,
J’admire son teint d’abricot, ses noix de coco.
Ce n’est pas la poussière qui s’en mêle,
Juste mes yeux qui se perdent.
Je sais une échoppe, rue des Allumettes,
Avec, en terrasse, un chat roux songeur.
Lorsque la porte en bois de Panama ne gémit plus,
Brassens, sur un vieux phono, chante les belles passantes.
Et moi, dans l’arrière-boutique aux senteurs de thé vert,
Je serre, tout contre mon cœur,
Ma petite libraire.
Automnale
Poème posté le 25/03/09