Le prisonnier
par Kasia
Il est là, dans sa vie
Tout comme un étranger,
Regardant, observant
Sans jamais être là,
Il est là, dans sa vie
Arbre déraciné,
Qui n'aurait pas choisi
De s'échouer ici.
Ici, dans cette cour,
Avec ce mur si haut,
Prisonnier de sa vie,
Même sans les barreaux,
Ici, dans cette cour,
Où il s'en vient marcher,
Prisonnier de son coeur
Et de sa vie qui meurt . . .
Et pourtant, il aimait
Etre avec ses amis,
A pleines mains cueillait
Cerises de la vie,
Par dessus tout, aimait
Sa fille, son soleil,
Et fou d'elle il était,
Yeux noirs et teint de miel.
Il la voyait grandir,
Il la voyait changer,
Imperceptiblement,
Du haut de ses seize ans ;
Il la voyait sourire,
Aurait dû se méfier
De certaines pâleurs,
De sa fragilité.
Puis un jour, il y eut
Ces hommes du métier,
D'uniformes vêtus
Pour le venir chercher,
Il dût alors les suivre
A l'hôpital, un soir,
Avait cessé de vivre
La gosse aux beaux yeux noirs.
Alors, son coeur de père
Ce jour là, explosa
En miettes, en morceaux,
Gicla de mille éclats !
Overdose, le mot
Claqua tout comme un fouet,
Cravachant et cinglant
Sa vie à tout jamais . . .
Pourquoi n'avait-il pas
Mieux su la protéger,
Sa gosse, son soleil,
Son étoile arrachée ?
Pourquoi n'avait-il pas
Su mieux la préserver
Sa gosse, son soleil
Qui s'en étaient allés ?
Dans son coeur égaré,
Surgit soudain l'idée,
Ne pas laisser en vie
Celui qui l'avait tuée !
Ne pas faire de cadeaux
A l'enfant de salaud,
La haine fit de lui
Un simple meurtrier.
Hanté par son amour,
Rongé par ses regrets,
Il ne voit plus la cour,
Les hauts murs, les barreaux,
Prisonnier de lui-même
Son âme déchirée,
L'homme à la face blême
A cessé d'espérer.
Mais qui pourra lui dire,
A cet homme brisé,
Qui lui reprochera
D'avoir trop fort aimé ?
Il le paie, ici-bas
Ses yeux ne vous voient plus,
Et loin, si loin de tout,
Son regard s'est perdu.
Il est là, dans sa vie,
Tout comme un étranger,
Muet, indifférent,
Sans vraiment être là,
Il a bien trop vécu
Ne veut plus de sa vie,
Arbre déraciné
Ayant échoué ici.
Ici, dans cette cour,
Avec ce mur si haut,
Prisonnier de sa vie
Même sans les barreaux ;
Ici, dans cette cour
Où il s'en vient marcher,
Prisonnier de son coeur
Et de sa vie,
Sa vie qui meurt . . .
Poème posté le 01/10/04