Quand prend son vol l'oiseau de neige,
dans le grand calme de la nuit,
il laisse glisser derrière lui,
tout comme une épousée nouvelle
sa traîne moussant de dentelle,
les blancs ourlets de ses festons,
accroche, en riant, à ses ailes,
les pointes branchues de l'aster
ou l'or ébloui des lamés
pris aux cheveux d'une comète.
Belle nuit sereine et tranquille,
ouvre tes bras sur le silence,
action de grâce au ciel immense,
protège-les de ta confiance,
ces passagers de l'au delà,
prolonge encore un peu leur rêve,
accorde leur juste une trêve
et surtout ne te presse pas
d'aller dire au creux de la vague
qu'elle prépare son accueil...
Là-haut, le bel oiseau s'inquiète,
rien ne va plus dans l'appareil,
la nuit s'agite et puis s'affole,
embrase et brise chaque songe
du plus léger ou lourd sommeil,
premier voyage ou fol amour,
joie du départ, joie du retour,
vont se noyer dans la détresse
des inaudibles SOS,
une à une, arrachées au ciel
comme des pierres sidérales,
aérolithes ou météores,
étoiles filant vers la terre,
ces vies qui plongent, verticales,
nimbées des voiles de leur deuil,
jusqu'au trou noir de leur cercueil.
[ Le grand oiseau
s'est tu
on ne saura jamais
qui l'a réduit au silence
et contraint à garder
pour lui
les causes exactes
de sa disparition]
Pour ne pas les oublier, 30 mai 2009, vol Rio-Paris, 228 disparus.<br />