Je suis mort autrefois aux bords d'un petit fleuve
Près du bois d'Azincourt, dans les plaines du nord
Je ne sais pas pourquoi je pense à cette mort
Était-ce vraiment moi ? je n'en ai nulle preuve.
J'étais blessé, couché sur la plage de sable
Une flèche plantée dans mon flanc, mon épée
Ébréchée et tordue gisait à mon coté
J'aurais voulu crier, j'en étais incapable.
J'entendais les blessés qui appelaient à l'aide
Et les cris des anglais poursuivant les fuyards
On voyait dans le soir flotter leurs étendards
Un cheval mort tendait au ciel sa patte raide.
Le cours d'eau lentement emportait les dépouilles
Dans l'ombre des forêts on entendait les loups
Le soleil se couchant j'entendis tout à coup
L'appel lointain du cor des dernières patrouilles.
Je ne sentais plus rien, le sang de ma blessure
Se mêlant à la boue innondait le rocher
J'étais comme un taureau sur l'étal du boucher
Et le froid dans mon coeur resserrait sa morsure.
Alors j'ai entendu dans un brouillard de fièvres
Ma mère m'appeler de mon surnom d'enfant
Et j'ai cru retrouver à mon dernier instant
Les yeux de mon amour et le goût de ses lèvres.