Depuis vingt ans déjà elle espère et attend
Celui qui lui fut enlevé
Cet homme enfui de l'Est et réfugié chez nous
Qui lui fit découvrir l'affre de l'amour fou
Et sur elle de prise aucune n'a le temps
Toujours je vois son coeur levé
Que ce soit par ambassades ou par maffias
Elle cherche celui auquel son corps se fia
Étudiante elle était Elle alla au matin
En fac de Droit suivre ses cours
Elle ignorait qu'au soir serait venue la fin
Et il s'évanouit quand la police vint
Tout était comme s'il n'avait jamais été
Que vides et longs sont les jours
Quand du sang les aiguilles se sont arrêtées
Quand vivre se réduit à l'espoir entêté
Elle est belle et brillante Elle est grande et princesse
Et je l'aime comme ma soeur
Comment la délivrer de sa longue détresse
Elle qui de douleur ne sait d'autre caresse
Sa volonté d'acier a fermé toutes portes
Je connais pourtant sa douceur
Cachée sous la colère qui souvent l'emporte
Je ne sais l'alléger moi qui suis d'autre sorte
Il fut ce slave fou romantique et voyou
Rêve d'âme et de chair brisées
Celui qui ne voulut jamais plier genoux
Celui qui lui apprit à conjuguer le nous
J'ai vu dans son sommeil son corps majestueux
Par nul autre désir prisé
Réclamer la venue de son ange des cieux
Mais quel geste risquer autre qu'incestueux
Si vous pouviez imaginer combien je l'aime
Cet astre en l'infini perdu
Si vous saviez que je ne sais plus grand poème
Que cette vie dont le gouffre est l'unique thème
Dix ans après il t'écrivit de son exil
Sa lettre habille ton coeur nu
Tu sais combien sont vils tous ces fiers imbéciles
Qui assignent les âmes dans d'infâmes villes
Où est-il parmi nous ou parti au-delà
Où est ton amour mon amour
Je te l'emmènerais si je le trouvais là
Car heureux je serais que tu saches la joie
C'était en l'an quatre vingt trois en notre France
Dite douce et rose en ces jours
Le mur n'avait encor cédé à ses carences
Et depuis ma Princesse plus jamais ne danse.
04/11/2003