Le saule et le pommier
par Didier Viaud
Quelque part…
entre hier et maintenant
Il n’était que bois mort, arbre déraciné,
Arbrisseau sans défense que l’on avait jeté,
Comme on arrache une herbe d’un rang de peuplier.
Ses rameaux allongés, en quête d’un abri,
Désordonnés et maigres, si peu en harmonie,
Enlaçaient un pommier qu’il avait pour ami.
Le verger quadrillé de troncs bien alignés,
Aux très larges allées de sable ratissé,
Etait bien la fierté du maître jardinier.
Les pommiers étaient beaux et donnaient de bons fruits,
Mais un semblait malade et causait du souci,
Par un saule pleureur il était envahi.
Le comte du comté avait envisagé,
En cette fin d’été de s’en débarrasser ;
Le saule et le pommier en furent déchirés.
Il n’est plus que bois mort, arbrisseau sans ami,
Celui qui l’arracha était plus grand que lui,
Pour le pommier aimé il a donné sa vie.
De longs jours s’effilaient, quand l’enfant écolier,
Près du saule mourant un soir vint à passer,
Un enfant innocent qui de lui eut pitié.
Les racines de l’arbre dans la terre il enfouit,
Priant le Dieu d’amour de lui donner la vie ;
Le miracle attendu, un matin, s’accomplit.
Autrefois si chétif, l’arbre ressuscité,
Par le vouloir de Dieu ses rameaux fortifiés
Sont des plus élégants et des plus admirés.
Le pommier son ami se mourait lui aussi,
Quand un soir de tempête d’une branche il sentit
Un rameau familier qui de désir frémit.
…
Il paraît qu’aujourd’hui le pommier a grandi
Le comte du comté en est tout ébahi,
Les deux arbres impurs donnent les meilleurs fruits !
Poitiers, 1984<br />
Vienne, 3 mai 1996<br />
Poème posté le 01/11/09