(Sur un tableau de Sébastien Simonnet dit Sébastien, 1909-1990)
Nous rêvons quelquefois d’un escalier immense
Partant du sol banal et lourd de notre nuit
Et montant, vertical, dans la lumière intense
D’un zénith imprécis.
Témoignage muet de très vieilles souffrances,
Les pas de nos anciens ont creusé son granit,
Traces fossilisées des ultimes errances
De peuples évanouis.
Jusqu’où va-t-il monter ? vers quelle délivrance ?
Vers quel jardin d’Eden, quel heureux paradis ?
Y retrouverons-nous le Dieu de notre enfance
Ou quelque démenti ?
Nous voilà pleins d’espoir, abordant l’escalade
De l’escalier géant, décidés et hardis.
Mais la pente s’accroît, étroites sont les dalles
Sous nos pas ralentis.
Plus de marches bientôt, notre force se lasse
Devant le mur brutal et dur de l’incompris
La lumière nous brûle, et le poids nous écrase
Et tout espoir s’enfuit.
Mais peut être qu’alors, laissant sur la rocaille
L’inutile fardeau de notre corps détruit,
Libre, vers le Soleil qui dore la muraille
Volera notre esprit !