Le génie-cologue
par Reumond
par Reumond
Depuis bientôt neuf mois, mon génie-cologue m’affirme que je vais accoucher d’une idée lumineuse !
Alors, avec patience, j’attends ce moment-là ; je temporise cette éblouissante révélation, je guette ce flash inouï dans les couloirs du temps.
Je veux saisir à pleines mains les spasmes créateurs de la matière brute ; je calcule d’avance les contorsions crues de l’extase, j’espère un big bang de cœur avec l’expansion cosmique de mes sens et de mes Univers intérieurs, avec des visions démesurées comme les artistes, les voyants et les prophètes ; de gigantesques émotions, des convulsions pharamineuses comme des orgasmes de grandes constellations ; je veux la sainte béance, l’auréole, la sainteté; voir le trou noir, sentir entre mes lèvres moites les contractions de l’antimatière, et caresser les seins des espaces parallèles, pour me perdre ainsi dans les couloirs intemporels de cuisses incommensurables, infinies; oui, je veux jouir pour l’éternité des crispations quantiques et des folles agitations des protons sur ma peau dénudée.
Mais depuis neuf mois je me contente d’écrire, l'encre sèche, je n'accouche que de vains mots qui ne sont que de paille ; le flash se terre, l’ombre usurpe la lumière. Point de spasme en dehors des crispations de Bic et des crampes de la main ; point d’extase, rien que des points d’interrogation sur un ciel gris, telle une chape de plomb, des idées noires et des banalités sans futur, des bavardages, du vent, de l’illusion en aplats sans consistance et sans perspective.
Mon génie-cologue m’aurait-il abusé ?
Poème posté le 03/11/12
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