La porte s’ouvrait sur l’heure bleue
Et nous courions sous la bourrasque
Aux feux follets de feuilles mortes
Le bouquet d’air goûtait la faîne*
Nous coupions par le chemin couleuvre
Ses écailles luisaient sous la drache*
Il se coulait entre les haies
De notre terrain de maraudes
Nous bondissions entre les glaises
Dans le jus vert d’herbes foulées
Sans écraser les limaçons
Et sans embourber nos molières
Et elles claquaient dans l’escalier
Où l’eau tressautait en cascade
Les garçons pissaient dans le flot
Quolibets au diable vau vert !
Une querelle d’ailes montait des pins
Le geai, le ramier et la pie
La hulotte ou le pic épeiche
Nous faisaient vite lever la tête
Et nous sentions couler la pluie
Dans nos cheveux sur notre nuque
Déjà nos pieds étaient trempés
Serions-nous punis du retard ?
Il nous fallait forcer l’allure
Battre ce tienne* de vilaines pierres
Où les schistes s’hérissaient en lames
Lacérant nos culs de semelles
Puis notre vue se dégageait
Sur un tremplin bleuté de rues
Qui veinaient ce corps de versant
Nous surplombions l’ardoise des toits
La pente culbutait vers l’aval
Nos malettes* lestées d’ignorance
Un chant de scies et de rabots
Proclamait la rue laborieuse
En bas l’église sonnait basse messe
Quand surgis comme horde ruante
Nous déboulions tonitruands
Dans notre école à fond d’impasse.
faîne: fruit du hêtre<br />
drache: averse<br />
tienne: chemin en pente forte/ pente<br />
malette: cartable