Marronniers
par Saline
Marronniers
Platanes
Ormes
Bambous
Le vent dans leurs branches
Console
Les âmes en panne
En peine de vivre
Dans le jardin
Nous promenons le chagrin
A nous attaché
Chien fidele
Plus que tout
Le lierre observe
Le hasard mis dans nos pas
Récolte
Au sein
De son réseau de veines étoilées
Nos larmes
La mélancolie est un train de nuit
Tout passe furtivement
Comme les villes et les villages
Les voitures au loin
Dans le couloir
Des visages blêmes
Certains voyages plus que d’autres
La nuit
Je peins la nuit
Outremer
Bleu de Prusse
Cobalt
Violatine
Jamais la couleur n’est assez sombre
Le noir est un joker
Une carte peu régulière
Une triche
Une élégance de diva
Une colère des beaux arts
Le noir résiste
Indispensable
Aux vestes des dandys
Aux plumes de corbeaux
Aux chants de Barbara
Donc
Equation
Addition
Le noir est notre lumière
Aux peintres
Comme aux poètes
Aux mélancoliques
Comme aux rideaux baissés
Des trains de nuit
Les vagues de l’esprit
Meurent
Soit simplement
Comme sur le bord d’une rivière
Ou tempétueuses et océanes
Sur les côtes atlantiques
Mes voiles tirent en bordé
Un trois mâts
Retour sous la tonnelle
Ou les roses réclament la rosée
De ciels absents
Nos âmes s’y égarent le temps d’une chanson
Ou le temps d’une vie
Nous les grands blessés
Parlons
Aux arbres
Marronniers
Platanes
Ormes
Bambous
Sous l’œil vert des lierres
Sous la pupille des chats curieux
Nous les grands blessés
Soufflons aux écorces écorchées des bouleaux
Caressons les épines de buissons
Cueillons l’ortie
De notre maladie
L’alcool
Est un transsibérien
Aux déserts froids
Asiatiques
Là-bas passe des caravanes indolentes
Importe
Le silence de nos yeux
Les avallent
Le bol
C’est le luxe d’une première classe
Et d’un parc aux arbres emplis
De la joie des merles et des moineaux
Le manque de bol
C’est m’homme à moitié nu sur un trottoir
A la vue mangée et qui ne voit plus le monde
Et les gens
Qui s’écartent d’un détritus
Sous la ramure géométrique des pins
J’entends lointain
Je suis de peu en mémoire instruite
J’entends ce poème de Friedrich Nietzsche
Homme! Fais bien attention!*
Que dit le profond minuit?
« Je dormais, je dormais,
Je me suis réveillé d’un rêve profond :
Le monde est profond,
Et plus profondément pensé que le jour.
Profonde est sa douleur;
Le plaisir, plus profond encore que la peine du cœur :
La douleur dit : « Passe! »
Mais tout plaisir veut l’éternité,
Veut la profonde, la profonde éternité! »
Mon éternité
Enigme
De ma raison
Et surtout de ma déraison
Mon éternité
Est bercée
Du chant de la terre.
• Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra
Poème posté le 14/12/17