Adieux à Amélie

Chère Amélie, adieu, nos chemins se séparent.
Ton mystère émouvant, par un sort trop humain,
A dévoilé le pire au-dedans de ton sein,
En ces noires ardeurs dont tes rêves se parent !

J’avais cru voir en toi la lumière des grands
S’élever, tel des nuits le rayon d’une aurore,
Libre, enfin, de la dent de l’affreux Minotaure
De l’ambition vaine et des troupeaux errants ;

J’avais cru voir en toi naître une nouvelle Ève,
Tant je te vis briller de victoire et d’amour
Par-delà tant de nuit, tant de nid de vautour,
À ne sentir en toi de la Femme la sève,

Et de par ton esprit, si clair et si charmant,
J’en venais à rêver de ta grâce future,
Tant je le croyais fort au seuil de l’aventure
À jamais au-delà d’un passé désarmant,

Mais hélas, pauvre fleur, tu te crus arrivée
Et Reine du Soleil ton germe à peine éclos,
L’étreignant de désirs droits issus de l‘enclos
Où si longtemps d’air pur ton âme fut privée,

L’accablant de misère au nom du vieux serpent
Absurde et dérisoire, indigne de la Bible,
Le faisant de la nuit l’Auteur irrémissible,
Afin de le conduire à tes vains pieds rampant.

Mais que sais-tu du jour et de la conscience ?
C’est la Femme, dis-tu, qui les donne tous deux ;
Et c’est ce qui confond la noirceur de tes feux.
Ils n’ont qu’une origine, et c’est La Différence.