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Saintes
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Posté à 18h40 le 08 Dec 21

Version améliorée
Les noirs corbeaux que je voyais dans les champs ponctuaient de notes d’ébène leur étendue. C’est pourquoi rentrant dans mon gîte, j’allumais une bougie, flamme dans les ténèbres, fragile, mais qui me fit voir en elle une éclaircie.
Le bleu de son feu me transporta, voguant sous le ciel des îles grecques. Je fondais au soleil dans une chaleur matinée de sel. Paysage sans fin et goût de l’éternité, que renforçait la présence de chapelles aux murs de chaux et calottes de couleur vive.
Je me souviens de ces rencontres et surtout d’Hélène, cette inconnue. Elle me confia son prénom. Son regard si noir qu’il contenait l’histoire de sa famille. Douloureuse occupation turque. Cependant une étincelle y brillait assez violemment. Peut-être une brûlure en elle. Nous marchions sur la plage en plein soleil : nos silences parlaient pour nous. Elle s’exprimait peu mais avec une spontanéité assez violente. Contrastes de ce pays âpre et beau. Son feu intérieur rougeoyait avec une grande tension : je pouvais en ressentir l’effet. L’atmosphère vibrait autour de nous. Elle me souffla qu’elle était fort exclusive. Je sentais qu’elle pouvait se donner toute et me fit un peu peur. Sans doute trop raisonneur et tout en retenue, je n’étais pas prêt à me consumer, pour autant que l’amour ait allumé en moi sa mèche. Je n’étais pourtant pas insensible à sa sensualité : flamme dans un corps de porcelaine.
Les conversations agréables de notre petit groupe m’échappaient un peu. Pour moi je naviguais dans une moisson de sentiments. Amitié impossible, amour inaccessible, étonnement, poème amoureux, poème esthétique, envie, tristesse, admiration. Les saveurs en étaient riches. Nos regards se croisant peu dans le village de nos peurs. Angoisse inavouée ? Était-ce pour moi le début d’une fuite en rase campagne ? Imperceptiblement je la sentais bouillonnante et blessée. Une ombre frémissante dans ces yeux que je croisais par intermittence. Tout mon corps retenait le tremblement intérieur qui m’envahissait. Nous nous tûmes.
Quand nous levâmes l’ancre en fin d’après-midi, elle était sur l’avancée du quai agitant la main. Lui répondant j’avais la gorge nouée. Une silhouette gracile et sa chevelure de jais comme un fanal dans la lumière déclinante : la flamme de notre rencontre faiblissait.
Et ma bougie pleurait sur son sort des larmes de paraffine. Elle voyait ainsi son temps s’étioler. Pour la pérenniser je soufflais dessus. Lors mes songes s’enfuirent dans le noir me laissant seul avec moi-même.




Ce message a été édité - le 24-12-2021 à 14:41 par Saintes

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