Salus
Membre
Messages : 5146
|
Posté à 20h56 le 23 Feb 21
Ornithologie
Que le rouge-gorge en trilles,
S'égosille dans la nuit !
Quant au coucou, toi qui pilles,
Dont, sangsue, à tous l'us nuit,
Ton cri lancinant nous charme
Comme cajolent les geais,
Malgré l'horreur et la larme
Des autres oiseaux piégés !
Pie amie et envieuse
Au blanc et noir de ton frac
Il est mainte couleur ! L'yeuse
Le sait : sa moire est d'un lac !
Minuscules troglodytes
Tressant de si jolis nids,
Les uns des uns satellites,
Dans de vieux greniers garnis,
Vos petitesses exquises
Parmi vos charmants atouts,
Quand vous mangez les cerises,
Ravissent toutes et tous !
Probe aigrette immaculée,
Ton cou ploie, et tu le tends !
Ta patte, non spatulée,
Hésite et va - tout le temps ! -
Çà et là des mitraillettes
De piverts, marteaux-piqueurs
Font du bois mort des paillettes
Riches d'insectes – liqueurs ! -
Le moineau , tout seul, sautille
Cherchant la miette à glaner ;
Roulant l’œil comme une bille,
On l'entend presque ahaner
Lorsqu'il fouille sous les feuilles,
Pareil au merle - qu'il hait -
Bec jaune, toi qui tout cueilles
Le premier ! (sauf le fruit blet)
Là-haut la buse rapace,
Tueur maître des grands cieux,
Scrute, plane, erre et repasse
- Gare au lapin malchanceux ! -
Tourterelles toutes belles,
Béates, vous roucoulez,
Avec du pigeon les ailes,
Et les façons des poulets !
Huppe ornée au front sauvage,
Tu nourris tes petits punks
Perchés, loin de tout ravage,
Préservés même des skunks !
Fauvette ! Au buisson - multiple -
Très charmante, le feu vif,
Bien choyant ton condisciple,
Du fourré jusque dans l'if !
Et traçant le ciel qu'il scie,
Quelque triangle là-bas
Dont tout art bénéficie :
Vole l'oie en ses ébats !
Martinet, fausse hirondelle
Faux dans l'étoffe des airs,
Tu fuses, rasant de l'aile
Les champs, les murs, et les mers !
Des hiboux sont pour les soirs...
Et quelque chouette effraie,
Blanche éfrit fondue au noir
Profond, touffu, de la haie !
La mésange, comme au fil
Accroché, le funambule,
Dans son dais de bleu coutil,
De l'aurore au crépuscule,
Basculant, ni bas ni haut,
Pas plus devant que derrière,
Picore, d'un air nigaud,
Des insectes sous le lierre !
Si l'avocette, échassier,
Sonde la prairie humide,
C'est pour mieux rassasier
Une portée apatride !
Nulle frontière à l'azur,
Le balbuzard, où qu'il vogue
Méprise ce trait peu sûr
Qu'il observe d'un œil rogue !
Son cousin, milan royal,
Prince de la plaine immense
Au plomb du Dormeur du Val
Se tient immobile - et pense -
Circaète Jean-Le-Blanc
Tu tiens, parmi les rapaces,
L'austérité de ton rang
Et de ton regard tu glaces
L'affreux dindon mexicain
Et le bête paon d’Asie
Volatiles lourds du train
- Graisse et plumes d'aphasie -
Qui les cloue au sol des cours
- Et dans leur fatuité mièvre -
Agitant les moignons gourds
De leurs ailes où la fièvre
De la nue impulse encor
L'ample mouvement de rame
Dont toute grue, au ciel d'or,
Jouit - en s’emplissant l’âme ! -
Arrivant du Sahara
Le traqué-rieur nous narre,
Au pays dont naquit Râ,
Le palmier ombrant la jarre
Où pour boire, allait volant,
Comme saoule, sa famille,
Les plus vieux toujours voulant
Passer devant l'escadrille !
Et la grive et le guêpier,
Tout un petit peuple fauve
Prêt à tout, même à piller
Pour pondre un œuf dans l’alcôve...
Puis des passereaux étranges
Que le commun ne connaît,
Qui passeraient pour des anges
Si le Diable n'y cornait !
Car ils sont opportunistes
Prudents, quand même effrontés,
Et s'ils ont des airs si tristes,
Ce sont calculs éhontés !
|
Salus
Membre
Messages : 5146
|
Posté à 21h14 le 27 Feb 21
Incarnation d’un angle
Un ressort tend, infiniment violent,
A rebander l’arc et cintrer
L‘acier trempé de toute l’âme.
Tels que Sisyphe au rocher désolant,
Et nos visages à cendrer,
Nous sommes faits surtout de trame.
- Dans la machine infirme du vivant,
Lymphatique, fade réel,
Concrétise tes précipices !
Comme la vie, on va, toujours suivant,
Comme nos pères, l’éternel
Artificiel des vents duplices.
L’art du destin, le harassant hasard,
Plein d’entropie et de chaos,
C’est l’art furieux de l’existence,
C’est la folie et le feu, c’est la hart,
C’est le pendu dans les tarots
Et c’est le dé qu’un diable lance !
Mais tout n’est qu’absence et vide, et néant.
Contre un esprit du rêve vrai,
Je donnerais les pyramides !
Pour qu’un fond soit, dans le gouffre béant,
Que les flux, dont je m’enivrai,
Ne fussent pas qu’humeurs humides.
…
Rien n’est jamais, et le mot, même, est nul.
Pas de sortie, et pas de pont,
Pas de rebond et pas de porte,
L’on est issu d’un sage non-calcul.
Fasse, ô ciel ! ...Des dieux m’entendront,
Qu’ils fustigent mon âme morte…
|