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Poésie libre / Louchette à la lune.
           
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Louchette à la lune.
par Ann


par Ann


La maison crachait comme un chat Toute sa lumière sur les lueurs sanguines S’abattant sur l’Adour mauve d’encre. A l’heure où le chien se fait loup À croupetons, je restai sur le balcon, Occupée pensive à entendre la nuit traîner Le crépuscule sur l’agitation du monde. D’un coup, le hibou hua la tombée du jour. Arlequin frissonna sous son manteau Les chauves-souris levèrent Le rideau sur les secrets nocturnes. Une main sur mon cou, un baiser sur mes cheveux : « Ecoute là Ténébreux, mon prince, Sous la feuillée, recueilli sur mon sein ! » Louchette, la pauvrette en effet se lamentait Emplissant l’étang de ses peines confiées. Dans le miroir d’eau griffé de sphaignes, La lune était sa confidente, la nuit son amie Posa sur ses épaules un voile de vergogne. Le cœur humide de Louchette cognait, cognait, cognait. L’écho fidèle à la moquerie répétait à l’envi : « Grand Bond, mon anoure, Ta Reinette se meurt de ta cruelle absence. Ton abandon n’a aucun sens, La nature chantait ta beauté, ô beauté, Empire en boule niché dans mon goitre. Tes callosités nuptiales à mes saillies, arc-boutées Noyant nos jeux érotiques dans la vase, Ta peau sentant l’eau croupie et la pourriture de l’automne. Cette coquetterie globuleuse De cuivre soufré et vermiculé de suie. J’inonde de mes pleurs, ta beauté décampée Pour une hideuse voleuse d’amant. Le trait baveux qui déchirait admirable ta face fuyante Se resserra d’un cloaque sur un honteux baiser humain. Tes cuisses s’allongèrent en brindilles Rosées, couleur d’orage, Tes charmantes pustules s’évanouirent En peau de chagrin. Ô Grand Bond, mon anoure, Ô beauté crapaudine A nulle pareille, comparable, J’abandonne la place… et meurt sur la grève S’en fut ainsi jusqu’à l’aube La sérénade d’une grenouille. Au matin, ne restait de Prince Ténébreux Que l’oreiller défoncé par le souvenir D’une main caressante, d’un visage doux Chevillé sur une farandole de muscles Frais comme une randonnée sur la montagne. Ami, que tu sois Prince ou crapaud, Volage ou poussière devenue Il y aura toujours un œil Pour glorifier ta beauté, Beauté défunte, beauté d’anoure.



Poème posté le 11/03/19 par Ann



 Poète ,
 Interprète
Ann



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