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Auteurs Messages

Laugierandre
Membre
Messages : 1920


Posté à 11h17 le 14 Dec 19




Durant tous ces préparatifs de fêtes que nous allons vivre en féerie et en poésie ensemble, je vous invite, dans ce topic, à découvrir quelques poèmes sur l'ambiance de Noël, sur les paysages immaculés de neige, sur des mots "magiques" qui retracent toute la beauté et la nostalgie et font remonter en chacun de nous ces merveilleux souvenirs de l'enfance.

Partageons ces moments dans la FOI, dans l'AMOUR, dans la JOIE, dans l'ESPÉRANCE, aussi, pour celles et ceux qui sont dans la souffrance où qui connaitront la solitude en ces moments où le BONHEUR devrait être pour TOUS et la misère absente. Si vous avez des poèmes personnels ou si vous connaissez de beaux textes d'auteurs connus ou anonymes, c'est ICI que je vous invite à les déposer pour que durant ce mois qui nous sépare de Noël nous visitions et lisions ces pages qui nous rapprocherons encore plus les uns des autres. UN GRAND MERCI par avance.


Jacques-Imbert GALLOIX (1808-1828)

LA NUIT DE NOÊL

L'air est glacé, mais la nuit est sereine,
Les astres clairs nagent en un ciel pur ;
J'entends gémir les eaux de la fontaine ;
Le firmament étale son azur.

L'airain battu d'un coup triste et sonore
Seul a troublé le repos de la nuit.
Il est une heure, et moi je veille encore ;
Je veille seul, et le repos me fuit.

Oh ! que de fois le silence nocturne
Prêta son calme à mes songes divers !
Oh ! que de fois ma lampe taciturne
M'a vu rêver, lire, tracer des vers !

Nuit de Noël, derniers jours de l'année,
Oh ! que de jeux, de paix et de plaisirs
Vous rappelez à mon âme fanée !
Et tout a fui sous de nouveaux désirs !

Comme d'un rêve aussi doux que rapide,
Il me souvient de ce bonheur passé.
Bonheur d'enfance, imprévoyant, avide,
Que la raison a si vite effacé...

Il me souvient de ces cadeaux magiques
À mon réveil offerts dès le matin,
Et du foyer, et des plombs fantastiques,
Dont les contours présageaient le destin.

Me disaient-ils que je serais poète,
Victime, hélas ! des désirs de mon cœur ?
Que le chagrin ferait courber ma tête,
Et que jamais je n'en serais vainqueur ?...

Déjà la cloche a répété quatre heures ;
Je veille encor, je veille pour chanter.
Un bruit soudain ébranle nos demeures ;
Quelle douceur je trouve à l'écouter !

Quels sons divins, quelle auguste harmonie
L'airain du temple exhale dans les airs !
Comme l'espoir, mon âme rajeunie
Entend vibrer les célestes concerts.

Nuit de Noël, nuit de paix et de joie,
C'est dans ton sein qu'un Sauveur nous est né.
Le cœur soumis qui marche dans ta voie,
Humble et joyeux, n'est pas abandonné.

Ô mon Sauveur, viens éclairer ma route !
Viens me couvrir des ailes de la foi !
Ouvre mon âme et dissipe mon doute ;
Viens, je t'attends et je me livre à toi.
___________________

_Pierre DUPONT

LE NOËL DES PAYSANS

Noël ! des étables aux granges,
Chantez, vallons, dansez, hauteurs !
Jésus descend, quitte ses anges
Pour le bœuf, l’âne et les pasteurs.

En attendant la messe on veille,
On babille, on chante Noël ;
Dans les récits de la plus vieille
La jeune met son grain de sel.
Garçons joufflus, que l’on s’empresse,
Tout frais rasés, vêtus de drap !
Filles en blanc, vite à la messe !
Une étoile vous guidera.

Noël ! des étables aux granges,
Chantez, vallons, dansez, hauteurs !
Jésus descend, quitte ses anges
Pour le bœuf, l’âne et les pasteurs.

Quand à la file on communie,
L’orgue joue un air de hautbois ;
Quand toute la messe est finie,
On s’éparpille dans les bois.
Il fait si doux ! l’âme est contente.
J’entends un amoureux qui dit :
« Cette nuit, le rossignol chante,
La rose a fleuri cette nuit. »

Noël ! des étables aux granges,
Chantez, vallons, dansez, hauteurs !
Jésus descend, quitte ses anges
Pour le bœuf, l’âne et les pasteurs.

Jésus fait dans notre nuit noire,
Pauvres gens ! luire une clarté :
À sa santé nous devons boire,
Avec lui naît l’égalité.
Grands et puissants à mine altière,
Donnez s’il vous plaît un regard
Au roi du ciel et de la terre,
Né sur la paille d’un hangar.

Noël ! des étables aux granges,
Chantez, vallons, dansez, hauteurs !
Jésus descend, quitte ses anges
Pour le bœuf, l’âne et les pasteurs.
_____________________

Guy de MAUPASSANT

NUIT DE NEIGE

La grande plaine est blanche, immobile et sans voix.
Pas un bruit, pas un son ; toute vie est éteinte.
Mais on entend parfois, comme une morne plainte,
Quelque chien sans abri qui hurle au coin d'un bois.

Plus de chansons dans l'air, sous nos pieds plus de chaumes.
L'hiver s'est abattu sur toute floraison ;
Des arbres dépouillés dressent à l'horizon
Leurs squelettes blanchis ainsi que des fantômes.

La lune est large et pâle et semble se hâter.
On dirait qu'elle a froid dans le grand ciel austère.
De son morne regard elle parcourt la terre,
Et, voyant tout désert, s'empresse à nous quitter.

Et froids tombent sur nous les rayons qu'elle darde,
Fantastiques lueurs qu'elle s'en va semant ;
Et la neige s'éclaire au loin, sinistrement,
Aux étranges reflets de la clarté blafarde.

Oh ! la terrible nuit pour les petits oiseaux !
Un vent glacé frissonne et court par les allées ;
Eux, n'ayant plus l'asile ombragé des berceaux,
Ne peuvent pas dormir sur leurs pattes gelées.

Dans les grands arbres nus que couvre le verglas
Ils sont là, tout tremblants, sans rien qui les protège ;
De leur œil inquiet ils regardent la neige,
Attendant jusqu'au jour la nuit qui ne vient pas.
___________________

Théophile GAUTIER

FANTAISIES D'HIVER

Le nez rouge, la face blême,
Sur un pupitre de glaçons,
L'Hiver exécute son thème
Dans le quatuor des saisons.

Il chante d'une voix peu sûre
Des airs vieillots et chevrotants ;
Son pied glacé bat la mesure
Et la semelle en même temps ;

Et comme Haendel, dont la perruque
Perdait sa farine en tremblant,
Il fait envoler de sa nuque
La neige qui la poudre à blanc.

Dans le bassin des Tuileries,
Le cygne s'est pris en nageant,
Et les arbres, comme aux féeries,
Sont en filigrane d'argent.

Les vases ont des fleurs de givre,
Sous la charmille aux blancs réseaux ;
Et sur la neige on voit se suivre
Les pas étoilés des oiseaux......
__________________

Francis JAMMES

IL VA NEIGER

Il va neiger dans quelques jours. Je me souviens
De l'an dernier. Je me souviens de mes tristesses
Au coin du feu. Si l'on m'avait demandé : "Qu'est-ce ?"
J'aurais dit : "Laissez-moi tranquille. Ce n'est rien".

J'ai bien réfléchi, l'année d'avant, dans ma chambre,
Pendant que la neige lourde tombait dehors.
J'ai réfléchi pour rien. À présent comme alors
Je fume une pipe en bois avec un bout d'ambre.

Ma vieille commode en chêne sent toujours bon.
Mais moi j'étais bête parce que ces choses
Ne pouvaient pas changer et que c'est une pose
De vouloir chasser les choses que nous savons.

Pourquoi donc pensons-nous et parlons-nous ? C'est drôle ;
Nos larmes et nos baisers, eux ne parlent pas,
Et cependant nous les comprenons, et les pas
D'un ami sont plus doux que de douces paroles.

On a baptisé les étoiles sans penser
Qu'elles n'avaient pas besoin de nom, et les nombres
Qui prouvent que les belles comètes dans l'ombre
Passeront, ne les forceront pas à passer.

Et maintenant même, où sont mes vieilles tristesses
De l'an dernier ? A peine si je me souviens.
Je dirais : "Laissez-moi tranquille, ce n'est rien,"
Si dans ma chambre on venait me demander "Qu'est-ce ?"
__________________

Édouard PAILLERON.

NOËL

Noël ! Voici l’hiver joyeux, la nuit de fête !
Riche, puisque aussi bien ta vie est ainsi faite
Qu’il te faut un plaisir par jour, tu vas t’asseoir
Au réveillon quelconque où l’on t’attend ce soir ;
Après ton cercle, après ta visite aux théâtres,
Tu vas souper avec des personnes folâtres ;
Mais sans illusion aucune toutefois,
Comme tu vas au bal, comme tu vas au bois ;
Pour voir, pour être vu ; que sais-je ? pour la pose,
Pour remplir, en faisant n’importe quelle chose,
Le vide de tes jours qui ne sont jamais pleins,
Pour t’amuser, du moins tu le dis... Je te plains.

Je te plains d’aller là, toi pour qui toute fête
N’est qu’un long bâillement suivi d’un mal de tête ;
Je te plains de courir la ville cette nuit
Pour te désennuyer – et de changer d’ennui ;
Je te plains de n’avoir que l’ombre de la proie,
Que l’orgueil d’un bonheur dont tu n’as pas la joie,
L’orgueil absurdement stérile et douloureux
De vouloir qu’on t’envie et qu’on te croie heureux.

Ah ! si dans un moment d’oubli, d’oubli suprême,
Tu pouvais donc penser à d’autres qu’à toi-même !
Si tu pouvais aimer, haïr, si tu pouvais
Intéresser ton cœur aux choses que tu fais,
Ce cœur qui n’est pas mort, mais qui ne veut plus battre,
Quand tu tires à sept ou tu conduis à quatre ;
Si tu pouvais jeter ton masque d’homme fort,
Connaître la douceur saine qui suit l’effort,
T’évader du plaisir, sortir de toi, renaître
Dans quelque émotion profonde de ton être,
Croire, lutter, souffrir, te donner, vivre enfin...

Tu le peux : vois ce pauvre ; il a froid, il a faim ;
Regarde-le, tremblant et nu, sous la bise aigre,
Dans le carrefour noir, rôder comme un loup maigre ;
Les passants qu’il supplie, en marchant dans leurs pas,
Refusent de l’entendre et ne s’arrêtent pas...

Eh bien ! arrête-toi, riche, et fais-lui l’aumône ;
Le seul bonheur qu’on a vient de celui qu’on donne ;
Essaie et tu verras ; fais l’aumône, crois-moi,
Fais-la pour lui, fais-la pour Dieu, – fais-la pour toi.

Car – et ce que je dis va te sembler étrange –
L’aumône, entre le pauvre et toi, n’est qu’un échange.
Vous souffrez tous les deux : toi de l’horrible ennui,
Lui de l’horrible faim. – Tu souffres plus que lui.
Il ne veut qu’exister, mais toi, tu voudrais vivre ;
Délivre-le du mal, afin qu’il t’en délivre ;
Donne-lui l’être afin qu’il te donne à son tour
La vie, entends-tu bien ? c’est-à-dire l’amour,
Sa pitié, sa tendresse, et sa joie et sa flamme ;
Guéris son corps, afin qu’il guérisse ton âme :
Votre mal à tous deux s’appelle pauvreté...
Faites-vous tous les deux, frères, la charité.
___________________

C'EST LE SOIR DE NOËL...

Carillon argentin sonnant dans la vêprée,
Quand s’incruste au clocher le duvet floconneux
Des ravissants cristaux qui sur sa voûte crée
Un manteau satiné et fort volumineux.

C’est le soir de Noël, la terre fait silence ;
Un hommage de paix, après les chants sacrés.
Dehors, les grands sapins, que la neige ensemence,
Dans leur robe lactée frissonnent bien discrets.

Au travers des carreaux ma vue n’a rien d’égale,
Et bénit vers l’azur mes plus tendres desseins,
Tandis que le bosquet, figure pastorale,
Au chant d’un Sanctus Deus, inspiré par les Saints,

Parait s’épanouir d’un chœur qui tranquillise.
Quel chantre cultuel, aux répons fraternels,
Semble nourrir ma Foi dont l’écho fertilise
Mes rêves policés de parfums solennels ? …

Dans les maisons ornées de leurs lumières d’ambre,
Naît l’agitation, la chaleur de Noël ;
De fins souliers d’enfants qui ont rejoint leur chambre,
Vont attendre demain, selon le rituel.

ANDRÉ



À SUIVRE…




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Domenica
Membre
Messages : 346


Posté à 11h42 le 15 Dec 19

Belle initiative de préparer Noël ensemble..
et tu nous gâtes avec tous ces exemples, moi je ne crois pas connaitre de poèmes de grands auteurs sur noël, alors merci à toi pour la découverte; c'est très généreux.
Salut


Laugierandre
Membre
Messages : 1920


Posté à 12h35 le 15 Dec 19


Bonjour DOMENICA,

Je suis très sensible à tes mots de gentillesse et d'Amitié. Il est tout à fait normal qu'à l'occasion de ces fêtes de fin d'année un topic nous rassemble et nous fasse partager ces merveilleuses oeuvres d'auteurs anciens qui réveillent en nous les plus beaux sentiments et les plus féeriques pensées.

MERCI BEAUCOUP.

Passe un bien agréable dimanche.

TOUTE MA CHALEUREUSE AMITIÉ ET BISOUS DE MARSEILLE.

carpe diem

ANDRÉ
_________________



Carmen LAVOIE

SABOTS DES SANS-NOËL

Les deux petits sabots fêlés
Dans les grands chemins désolés,
Où vont-ils, chantant sur la grêle
Dont s’est clair verni leur bois frêle,
Les deux petits sabots tout blancs,
Aux petits pieds tout bleus dedans ?

Ils s’en vont fuyant l’âtre, au gel
Car les sabots des sans-noël,
Ô pourquoi ? retrouvés pleins d’ombre
Font au jour, deux trous au cœur sombre,
Les deux pauvres sabots navrants
Sans petits pieds de gueux dedans.

Décembre a des sabots trop grands.
_________________

ANONYME (1896)

CHRISTUS NATUS EST...

La neige sur la terre étend son blanc manteau ;
Le ciel est étoilé ; le souffle de la bise,
Passant comme un frisson, agite le rameau
Qui, léger, se balance à la branche indécise.

Dans la ville bruyante et dans l'humble hameau,
La foule, en beaux habits, se presse vers l'église :
Il n'est fête plus belle, il n'est pas jour plus eau
Que ta fête, ô Noël ! que la nuit poétise.

Cloches, sonnez, sonnez et vibrez dans les airs ;
De vos accents joyeux remplissez l'univers
Pour célébrer Celui qui naquit dans l'étable.

Dix-neuf siècles passés sur ce sol misérable
N'ont point fait oublier, à cette heure, en tout lieu
Que ce petit Enfant, ce Jésus, c'était Dieu !
_________________

Marcelline DESBORDES-VALMORE.

NOËL

Quel chant divin se fait entendre ?
Quel cri d’amour frappe les airs ?
Tout s’émeut... Qu’allons-nous apprendre ?
Quel Dieu s’annonce à l’univers ?
La lune argentée
Semble être arrêtée.
Qui trouble l’univers vivant ?
C’est un enfant !

Tout se tait, le vent souffle à peine,
Le sombre hiver est enchaîné,
L’autan surpris n’a plus d’haleine,
Et l’incrédule est prosterné.
Quelle est la puissance
Qui par sa présence
Ouvre le monde et le défend ?
C’est un enfant !

Les rois, le front dans la poussière,
Humbles pour la première fois,
Suivent l’étoile avant-courrière,
Pour adorer le Roi des rois.
Ce Dieu redoutable
Que craint le coupable,
Que le juste implore en tremblant,
C’est un enfant !

Quelle est cette Vierge céleste
Soumise aux terrestres douleurs ?
Dans son regard pur et modeste
Brillent le sourire et les pleurs.
Oh ! qui la rend telle ?
Qui, d’une mortelle,
Couronne le front triomphant ?
C’est un enfant !

La mort jalouse est asservie,
L’éternité vient de s’ouvrir,
Un Dieu, pour nous donner la vie,
Daigne avec nous naître et mourir.
Amour sans seconde
Ce martyr du monde
Qui s’abandonne en nous sauvant,
C’est un enfant !
__________________

Théodore BOTREL

LES CLOCHES DE MINUIT

La Terre espère et les Cieux rêvent ;
Il neige à gros flocons sans bruit ;
Quand, au loin, des rumeurs s’élèvent :
Ce sont les cloches de Minuit.

Écoutez : le carillon sonne
Et le bourdon, à l’unisson :
Qui restera sourd – personne –
À cette douce Chanson ?

Tour à tour, éloignés ou proches,
Les anges chantaient autrefois :
Aujourd’hui, dans la voix des cloches,
Nous entendons encor leurs voix !

Écoutez : le carillon sonne
Et le bourdon, à l’unisson :
Qui restera sourd – personne –
À cette douce Chanson ?

Devant le Nouveau-Né sans langes,
Bergers et rois, à qui mieux mieux,
Au chant des cloches et des anges,
Vont s’incliner dévotieux !

Écoutez : le carillon sonne
Et le bourdon, à l’unisson :
Qui restera sourd – personne –
À cette douce Chanson ?

Le Sauveur s’en vient dire aux hommes
Des mots pas encore entendus :
En son Nom, tous, tant que nous sommes,
Aimons-nous mieux ! Aidons-nous plus !
__________________







Ce message a été édité - le 15-12-2019 à 12:36 par Laugierandre


Laugierandre
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Messages : 1920


Posté à 12h30 le 18 Dec 19





Jean-Jacques AMPÈRE

LA CLOCHE DE NOËL

L'air est froid ; dans les cieux la lune brille et fuit ;
La cloche de Noël résonne dans la nuit.

Irai-je dans le temple où s'assemblent mes frères ?
Irai-je vers le Dieu qui consolait mes pères ?
Non, le temple est ouvert aux enfants de la foi,
Et le Dieu qui console est étranger pour moi.
Non, je ne prierai point ; que me fait la prière ?
Moi, j'écoute le vent siffler dans la bruyère.

L'air est froid ; dans les cieux la lune brille et fuit ;
La cloche de Noël résonne dans la nuit.

Voici la nuit du Christ, la nuit miraculeuse :
A cette heure, du ciel la voix mystérieuse
Plane sur le berceau des enfants nouveau-nés ;
Mais cette voix n'est pas pour les infortunés ;
S'ils regardent le ciel il devient noir et sombre,
Et des bruits effrayants les menacent dans l'ombre.

L'air est froid; dans les cieux la lune brille et fuit ;
La cloche de Noël résonne dans la nuit.

Ne priez point pour moi dans le temple rustique,
Ne priez point pour moi dans la chapelle antique,
Ô vous tous qui priez, ne priez point pour moi.
Seulement, si, le cœur saisi d'un vague effroi,
Vous arrêtez vos pas auprès du cimetière,
Pleurez, pleurez les morts et leur froide poussière.

L'air est froid ; dans les cieux la lune brille et fuit ;
La cloche de Noël résonne dans la nuit.
_________________

Jules BRETON

BEAU SOIR D'HIVER

La neige – le pays en est tout recouvert –
Déroule, mer sans fin, sa nappe froide et vierge,
Et, du fond des remous, à l’horizon désert,
Par des vibrations d’azur tendre et d’or vert,
Dans l’éblouissement, la pleine lune émerge.

A l’Occident s’endort le radieux soleil,
Dans l’espace allumant les derniers feux qu’il darde
A travers les vapeurs de son divin sommeil,
Et la lune tressaille à son baiser vermeil
Et, la face rougie et ronde, le regarde.

Et la neige scintille, et sa blancheur de lis
Se teinte sous le flux enflammé qui l’arrose.
L’ombre de ses replis a des pâleurs d’iris,
Et, comme si neigeaient tous les avrils fleuris,
Sourit la plaine immense ineffablement rose.
__________________

Théophile GAUTIER

FANTAISIES D'HIVER
I

Le nez rouge, la face blême,
Sur un pupitre de glaçons,
L'Hiver exécute son thème
Dans le quatuor des saisons.

Il chante d'une voix peu sûre
Des airs vieillots et chevrotants ;
Son pied glacé bat la mesure
Et la semelle en même temps ;

Et comme Haendel, dont la perruque
Perdait sa farine en tremblant,
Il fait envoler de sa nuque
La neige qui la poudre à blanc.

II

Dans le bassin des Tuileries,
Le cygne s'est pris en nageant,
Et les arbres, comme aux féeries,
Sont en filigrane d'argent.

Les vases ont des fleurs de givre,
Sous la charmille aux blancs réseaux ;
Et sur la neige on voit se suivre
Les pas étoilés des oiseaux.

Au piédestal où, court-vêtue,
Vénus coudoyait Phocion,
L'Hiver a posé pour statue
La Frileuse de Clodion.

III

Les femmes passent sous les arbres
En martre, hermine et menu-vair,
Et les déesses, frileux marbres,
Ont pris aussi l'habit d'hiver.

La Vénus Anadyomène
Est en pelisse à capuchon ;
Flore, que la brise malmène,
Plonge ses mains dans son manchon.

Et pour la saison, les bergères
De Coysevox et de Coustou,
Trouvant leurs écharpes légères,
Ont des boas autour du cou.

IV

Sur la mode Parisienne
Le Nord pose ses manteaux lourds,
Comme sur une Athénienne
Un Scythe étendrait sa peau d'ours.

Partout se mélange aux parures
Dont Palmyre habille l'Hiver,
Le faste russe des fourrures
Que parfume le vétyver.

Et le Plaisir rit dans l'alcôve
Quand, au milieu des Amours nus,
Des poils roux d'une bête fauve
Sort le torse blanc de Vénus.

V

Sous le voile qui vous protège,
Défiant les regards jaloux,
Si vous sortez par cette neige,
Redoutez vos pieds andalous ;

La neige saisit comme un moule
L'empreinte de ce pied mignon
Qui, sur le tapis blanc qu'il foule,
Signe, à chaque pas, votre nom.

Ainsi guidé, l'époux morose
Peut parvenir au nid caché
Où, de froid la joue encor rose,
A l'Amour s'enlace Psyché.
__________________

Gustave NADAUD

LA BÛCHE DE NOËL

Noël ! la bûche est allumée !
Et je suis seul, chez moi, la nuit.
Causons avec le feu, sans bruit,
Porte fermée.
Il peut trouver longs mes discours ;
Moi, j'estime les siens trop courts.
Noël ! la bûche est allumée !

Noël ! la bûche est allumée !
Ô bûche de Noël, es-tu
Le rameau d'un cèdre abattu
Dans l'Idumée ?
Mais non ; je sais bien qu'autrefois
Tu fus un chêne dans les bois.
Noël ! la bûche est allumée !

Noël ! la bûche est allumée !
Parle-moi de nos jours heureux :
Tu descends des coteaux ombreux,
Tout embaumée,
Apportant dans notre cité
Les parfums du dernier été.
Noël ! la bûche est allumée !

Noël ! la bûche est allumée !
As-tu vu des amants s'asseoir
En attendant l'heure du soir
Accoutumée ?
Chut ! on entend un bruit de pas...
Non : c'est un cerf qui fuit là-bas.
Noël ! la bûche est allumée !

Noël ! la bûche est allumée !
Viendrais-tu pas de la forêt
Où, sans se perdre, s'égarait
Ma bien-aimée ?
Les vieux chênes reverdiront,
La mousse au pied, la feuille au front.
Noël ! la bûche est allumée !

Noël ! la bûche est allumée !
Mais toi, tes destins vont finir :
Allez, bonheur et souvenir,
Cendre et fumée.
Adieu, ma bûche de Noël :
Tout rentre en terre ou monte au ciel.
Noël ! la bûche est consumée !
__________________



Hicvelibi
Membre
Messages : 162


Posté à 13h18 le 18 Dec 19

Ciao et grazie André pour la dynamique que tu insuffles,

Je ne participe pas beaucoup aux défis que tu proposes, pas plus qu'au calendrier de l'avent car je n'ai plus des masses de temps, ayant pris depuis le 9 du mois courant la responsabilité d'un nouveau poste représentant une charge de travail importante.

Je peux toujours le regretter mais c'est ainsi.

Pour autant, je publierai ici, sans doute vendredi prochain, un sonnet de mon cru sur Noël.

Bonnes Fêtes à tutti, dans le foie (gras) :)


Laugierandre
Membre
Messages : 1920


Posté à 18h55 le 18 Dec 19


Mais tu n'as pas à me remercier en particulier, HICVELIBI, car chacun, ici, apporte sa pierre à l'édifice. Comme je l'ai déjà dit, je ne suis qu'un maillon de la chaîne, parmi les poètes membres du forum.

Nous avons tous nos contraintes, nos obligations et poster nos poèmes ou nos commentaires ne doit pas être une sujétion.

Bien au contraire, contribuer à notre rythme, et selon nos disponibilités, doit rester un élément essentiel et récréatif pour évoluer ensemble dans cette fraternité qui sait nous réunir en bonne intelligence.

Moi aussi, j'ai un mois assez chargé en cette fin d'année, car mon métier de magicien m'oblige à m'absenter assez souvent pour mes prestations de spectacles. Il y aura des jours où je serai absent du forum, ne pouvant faire autrement.

D'ailleurs, je n'ai pas eu l'occasion, ni le temps de trop fréquenter le salon de la "Poésie en liberté", ni de commenter les poèmes qui y figurent.

Je te souhaite à toi aussi de passer d'excellentes fêtes de fin d'année, à partager avec les tiens.

Avec foie gras, bien sûr, et avec les desserts ! Mais attention tout de même à ne pas exagérer, car, comme disait un célèbre diététicien : "Si vous abusez de gâteaux il se pourrait que vous en pâtissiez !"


Mdr Salut Mdr Salut


Laugierandre
Membre
Messages : 1920


Posté à 17h46 le 20 Dec 19




Jacques-Imbert GALLOIX

LA NUIT DE NOËL

L'air est glacé, mais la nuit est sereine,
Les astres clairs nagent en un ciel pur ;
J'entends gémir les eaux de la fontaine ;
Le firmament étale son azur.

L'airain battu d'un coup triste et sonore
Seul a troublé le repos de la nuit.
Il est une heure, et moi je veille encore ;
Je veille seul, et le repos me fuit.

Oh ! que de fois le silence nocturne
Prêta son calme à mes songes divers !
Oh ! que de fois ma lampe taciturne
M'a vu rêver, lire, tracer des vers !

Nuit de Noël, derniers jours de l'année,
Oh ! que de jeux, de paix et de plaisirs
Vous rappelez à mon âme fanée !
Et tout a fui sous de nouveaux désirs !

Comme d'un rêve aussi doux que rapide,
Il me souvient de ce bonheur passé.
Bonheur d'enfance, imprévoyant, avide,
Que la raison a si vite effacé...

Il me souvient de ces cadeaux magiques
À mon réveil offerts dès le matin,
Et du foyer, et des plombs fantastiques,
Dont les contours présageaient le destin.

Me disaient-ils que je serais poète,
Victime, hélas ! des désirs de mon coeur ?
Que le chagrin ferait courber ma tête,
Et que jamais je n'en serais vainqueur ?...

Déjà la cloche a répété quatre heures ;
Je veille encor, je veille pour chanter.
Un bruit soudain ébranle nos demeures ;
Quelle douceur je trouve à l'écouter !

Quels sons divins, quelle auguste harmonie
L'airain du temple exhale dans les airs !
Comme l'espoir, mon âme rajeunie
Entend vibrer les célestes concerts.

Nuit de Noël, nuit de paix et de joie,
C'est dans ton sein qu'un Sauveur nous est né.
Le cœur soumis qui marche dans ta voie,
Humble et joyeux, n'est pas abandonné.

Ô mon Sauveur, viens éclairer ma route !
Viens me couvrir des ailes de la foi !
Ouvre mon âme et dissipe mon doute ;
Viens, je t'attends et je me livre à toi.
_________________

M. CHALIÈRE

LES BOUGIES DE NOËL

Chaque bougie a comme une âme
Qui vit, palpite dans la flamme...
Il semble même quelques fois
Qu'on entend de subtiles voix.

C'est que chacune a son langage.
La blanche dit : «Sois pur et sage !
Garde propre ton vêtement,
Garde ton cœur également !»

La bleue exhorte avec tendresse
Au pardon, à la gentillesse.
La verte, emblème d'espérance
Nous déclare : «Ayez confiance !»

La rouge célèbre la joie.
Elle nous dit : «Il faut qu'on voit
Sur vos visages radieux
Resplendir le bonheur des cieux!»

Puis la jaune, couleur d'étoile,
Rayonne ardent et nous dévoile
Le secret d'un profond bonheur
C'est d'aimer Dieu, de tout son cœur !
__________________

Raymond RICHARD

LE PLUS BEAU DES CADEAUX

Noël ! que nous apportes-tu
Dans tes bras si fragiles ?
Un cheval ? Une automobile ?
Un Pierrot au chapeau pointu ?
Noël, que nous apportes-tu ?

Nous apportes-tu dans ta hotte
Des oranges, du chocolat,
du pain d'épices, des nougats
Des pralines, des papillotes ?
Qu'y a-t-il au fond de ta hotte ?

Des joujoux, bien sûr, c'est parfait
Et c'est si bon les friandises !
Mais, dans tes menottes exquises
Trouverons-nous d'autres bienfaits ?
Noël, apporte-nous la Paix !
__________________

Augusta HOLMÈS

TROIS ANGES SONT VENUS CE SOIR

Trois anges sont venus ce soir
M’apporter de bien belles choses,
L’un d’eux avait un encensoir,
L’autre avait un chapeau de roses,
Et le troisième avait en main
Une robe toute fleurie
De perles d’or et de jasmin
Comme en a Madame Marie.
Noël ! Noël !
Nous venons du ciel
T’apporter ce que tu désires,
Car le bon Dieu
Au fond du ciel bleu,
Est chagrin lorsque tu soupires.

Veux-tu le bel encensoir d’or
Ou la rose éclose en couronne ?
Veux-tu la robe, ou bien encore
Un collier où l’argent fleuronne ?
Veux-tu des fruits du Paradis
Ou du blé des célestes granges ?
Ou comme les bergers, jadis,
Veux-tu voir Jésus dans ses langes ?
Noël ! Noël !
Retournez au ciel
Mes beaux anges, à l’instant même ;
Dans le ciel bleu,
Demandez à Dieu,
Le bonheur pour celui que j’aime.
__________________

Rosemonde GÉRARD

AINSI QU'ILS LE FONT CHAQUE ANNÉE

Ainsi qu'ils le font chaque année,
En papillotes, les pieds nus,
Devant la grande cheminée
Les petits enfants sont venus.

Tremblants dans leur longue chemise,
Ils sont là... Car le vieux Noël,
Habillé de neige qui frise,
A minuit descendra du ciel.

Quittant la guirlande des anges,
Le Jésus de cire et les Rois,
Transportant des paquets étranges,
Titubant sur le bords des toits,

Le vieux bonhomme va descendre ...
Et, de crainte d'être oubliés,
Les enfants roses, dans la cendre,
Ont mis tous leurs petits souliers.

Ils ont même, contre une bûche
Qui venait de rouler du feu,
Rangé leurs pantoufles à ruche
Et leurs bottes de vernis bleu.

Puis, après quelque phrase brève,
Ils s'endormirent en riant
Et firent un si joli rêve
Qu'ils riaient encore en dormant.

Ils rêvaient d'un pays magique
Où l'alphabet fut interdit ;
Les ruisseaux étaient d'angélique,
Les maisons de sucre candi ;

Et dans des forêts un peu folles,
Tous les arbres, au bord du ciel,
Pleins de brillantes girandoles,
Etaient des arbres de Noël.

Dans ce pays tendre et fidèle,
Les animaux parlent encore,
L'Oiseau Bleu vient quand on l'appelle ;
La Poule a toujours des œufs d'or.

... Mais comme venait d'apparaître
Peau d'Ane en un manteau de fleurs,
Le jour entrant par la fenêtre
A réveillé tous les dormeurs.

C'est un talon qu'on voit descendre !
C'est un pied nu sur le parquet !
Les mains s'enfoncent dans la cendre,
Comme un bourdon dans un bouquet !

"Une armure avec une épée !
- Un navire ! Un cheval de bois !
- Oh ! la merveilleuse poupée
Et qui parle avec une voix !

- Que la bergerie est légère !
- Et comme le troupeau est blanc !
- Le loup ! - le berger ! - la bergère !"
Tout tremble au bord du cœur tremblant...

Oh ! Bonheur ! Noël de la vie,
Laisse-nous quelques fois, le soir
Aux cendres de mélancolie,
Mettre un petit soulier d'espoir !
__________________



Ottomar
Membre
Messages : 1254


Posté à 08h59 le 21 Dec 19

Merci pour cette belle anthologie de Noël que seul un magicien-poéte pouvait sans doute offrir aux poètes du site.


Hicvelibi
Membre
Messages : 162


Posté à 11h45 le 21 Dec 19

Merci pour ta réponse, André et je te souhaite également de bonnes Fêtes

Merci aussi pour ce jeu de mots très appétissant en conclusion de ton message.

Et à travers le texte qui suit, je souhaite aussi de bonnes Fêtes à toute la communauté du site et, au-delà, à ceux qui viennent lire sans en être membre.

De bonnes Fêtes dans le confit, pas le conflit :)

D'un joyeux Noël

C'est la Nativité c'est le temps des cadeaux
C'est aussi le moment des bonbons et du miel
Ce jour Papa Noël va descendre du ciel
Il aura bien chargé sa hotte sur son dos

Toute la maisonnée s’apprête à l'accueillir
La dinde est dans le four le repas est copieux
Pour tous ces doux instants sont vraiment merveilleux
L'arbre est bien décoré et on a le sourire

Puis le soir du sapin s'approchent les enfants
Ils sont des mains tapant d'impatience piaffant
Observant le tableau les parents sont aux anges

Les premiers à leur joie découvrent leurs offrandes
Le plaisir des seconds est alors sans mélange
Déjà leurs rejetons dansent la sarabande

Extrait du recueil Pas d'quoi en faire un sonnet



Ce message a été édité - le 21-12-2019 à 11:47 par Hicvelibi


Laugierandre
Membre
Messages : 1920


Posté à 11h46 le 21 Dec 19


Bonjour OTTOMAR et mes vifs remerciements pour ces mots de générosité, d'Amitié et de partage.

Le poète est un peu comme un magicien qui, d'un coup de plume, peut transformer toutes les causes perdues et offrir ainsi du rêve et du bonheur aux autres.

La magie est la poésie du geste, tandis que la poésie est la magie des mots.

Je te souhaite de passer un excellent week-end ainsi que de bien réjouissantes fêtes de Noël.

Ma bien chaleureuse sympathie de plume.

CARPE DIEM

ANDRÉ


Ottomar
Membre
Messages : 1254


Posté à 11h53 le 21 Dec 19


Noël des ramasseurs de neige

de Jacques Prévert (1900-1977)



Nos cheminées sont vides
nos poches retournées
ohé ohé ohé
nos cheminées sont vides
nos souliers sont percés
ohé ohé ohé
et nos enfants livides
dansent devant nos buffets
ohé ohé ohé

Et pourtant c'est Noël
Noël qu'il faut fêter
Fêtons fêtons Noël
ça se fait chaque année
Ohé la vie est belle
Ohé joyeux Noël
Mais v'là la neige qui tombe
qui tombe de tout en haut
Elle va se faire mal
en tombant de si haut
ohé ohé ého

Pauvre neige nouvelle
courons courons vers elle
courons avec nos pelles
courons la ramasser
puisque c'est notre métier
ohé ohé ohé
jolie neige nouvelle
toi qu'arrives du ciel
dis-nous dis-nous la belle
ohé ohé ohé
Quand est-ce qu'à Noël
tomberont de là-haut
des dindes de Noël
avec leurs dindonneaux
ohé ohé ého !


Laugierandre
Membre
Messages : 1920


Posté à 11h58 le 21 Dec 19


Bonjour HiCVELIBI,

Tes mots sont chaleureux et j'en apprécie le côté amical et enthousiaste.

UN GRAND MERCI pour ce beau cadeau, sous forme de sonnet, que tu dédies à tous les membres du forum.

Ta gentillesse n'a d'égale que la finesse de ta plume et de tes sentiments.

Passe un excellent week-end, et des très joyeuses fêtes de Noël.

CARPE DIEM

TOUTE MA SYMPATHIE.

ANDRÉ


Laugierandre
Membre
Messages : 1920


Posté à 12h25 le 22 Dec 19


Je te sais gré, OTTOMAR pour l'intérêt que tu portes à ce topic, ainsi que pour ta bien aimable contribution en ayant posté ce poème de Jacques PRÉVERT qui vient s'ajouter à cette petite compilation qui montre à quel point de nombreux poètes se sont intéressés à la magie de Noël.

TOUTE MA CHALEUREUSE AMITIÉ.

Passe un excellent dimanche.

CARPE DIEM

ANDRÉ


Laugierandre
Membre
Messages : 1920


Posté à 12h36 le 22 Dec 19




Eulalie BOISSONNAULT

NOËL

Noël ! Un chant s’élève éclatant dans la nuit,
Il épand ses flots d’or, vibre, s’épanouit :
Pastorale sacrée !
Les anges l’ont transmis aux bergers anxieux
Et l’univers redit la chorale des cieux :
C’est l’hymne consacrée !

Noël ! La neige met dans les arbres glacés
Un luxe de blancheur, treillis foliacés,
Imitant la guipure ;
Sur l’asphalte, elle étend ses beaux papillons blancs
Et sur les toits hier, obscurs ou rutilants,
Sa gaze la plus pure.

Noël ! La cloche prend son vol joyeux dans l’air,
La lune vaporeuse a des teintes d’éclair,
Un air de chrysanthème ;
Et mille étoiles d’or fleurdelisent le ciel
Humanité, Dieu t’aime !

Noël ! vieux mot d’espoir, d’allégresse et de paix,
Mot qui met en éveil des ferveurs de respects,
Mot qui sonne et convie
À la crèche sacrée où le petit Jésus
Nous apporte des biens que nous n’aurions pas eus
Sans sa terrestre vie.
__________________

Edmond ROSTAND

LES ROIS MAGES

Ils perdirent l'étoile, un soir ; pourquoi perd-on
L'étoile ? Pour l'avoir parfois trop regardée,
Les deux rois blancs, étant des savants de Chaldée,
Tracèrent sur le sol des cercles au bâton.
Ils firent des calculs, grattèrent leur menton,
Mais l'étoile avait fuit, comme fuit une idée.
Et ces hommes dont l'âme eût soif d'être guidée
Pleurèrent, en dressant des tentes de coton.
Mais le pauvre Roi noir, méprisé des deux autres,
Se dit "Pensons aux soifs qui ne sont pas les nôtres,
Il faut donner quand même à boire aux animaux."
Et, tandis qu'il tenait son seau d'eau par son anse,
Dans l'humble rond de ciel où buvaient les chameaux
Il vit l'étoile d'or, qui dansait en silence.
__________________

Jean DANIEL (1490-1531)

NOËL

Gentils pasteurs, qui veillez en la prée,
Abandonnez tout amour terrien,
Jésus est né et vous craignez de rien,
Chantez Noël de jour et de vesprée.
Noël !

Laissez agneaux repaître en la contrée,
Gloire est aux cieux pour l'amour de ce bien
Qui porte paix, amour et entretien ;
Allez le voir, c'est bonne rencontrée.
Noël !

Or est ému tout le pays de Judée,
Pasteurs y vont, ne demandez combien,
Portant présents et de va et de vient ;
Sans celer rien leur bourse fut vidée.
Noël !

La toison d'or qui est emprisonnée
Sera dehors de ce cruel détient
Car Jésus est trop plus nôtre que sien :
Pour la tirer la chose est jà sonnée.
Noël !

Aurora vient que la nuit est finée,
Honnêtement et de très bon maintien
Rompu sera le fier et âpre chien
Portier d'enfer ; sa cause est assignée.
Noël !

Prions Jésus qu'à la sainte journée
Ayons de lui tout appui et soutien.
Vierge Marie, il est nôtre, il est tien,
Compose o lui, que paix nous soit donnée.
Noël !
_________________

Louis FRECHETTE

NOËL

Le lourd battant de fer bondit dans l’air sonore,
Et le bronze en rumeur ébranle ses essieux...
Volez, cloches, grondez, clamez, tonnez encore,
Chantez paix sur la terre et gloire dans les cieux !

Sous les dômes ronflants des vastes basiliques,
L’orgue répand le flot de ses accords puissants ;
Montez vers l’Éternel, beaux hymnes symboliques,
Montez avec l’amour, la prière et l’encens !

Enfants, le doux Jésus vous sourit dans ses langes ;
À vos accents joyeux laissez prendre l’essor ;
Lancez vos clairs noëls : là-haut les petits anges
Pour vous accompagner penchent leurs harpes d’or.

Blonds chérubins chantant à la lueur des cierges,
Cloche, orgue, bruits sacrés que le ciel même entend,
Sainte musique, au moins, gardez chastes et vierges,
Pour ceux qui ne croient plus, les légendes d’antan.

Et quand de l’an nouveau l’heure sera sonnée,
Sombre airain, coeurs naïfs, claviers harmonieux,
Pour offrir au Très-Haut l’aurore de l’année,
Orgues, cloches, enfants, chantez à qui mieux mieux !
__________________

Jean RICHEPIN

NOËL MISERABLE

Noël ! Noël ! À l’indigent
Il faudrait bien un peu d’argent,
Pour acheter du pain, des nippes.
Petits enfants, petits Jésus,
Des argents que vous avez eus
Il aurait bourré bien des pipes.

Noël ! Noël ! Les amoureux
Sont bien heureux, car c’est pour eux
Qu’est fait le manteau gris des brumes.
Sonnez, cloches ! cloches, sonnez !
Le pauvre diable dans son nez
Entend carillonner les rhumes.

Noël ! Noël ! Les bons dévots
S’en vont chanter comme des veaux,
Près de l’âne, au pied de la crèche.
Notre homme trouverait plus neuf
De manger un morceau de boeuf,
Et dit que ça sent la chair fraîche.

Noël ! Ça sent les réveillons,
Les bons grands feux pleins de rayons,
Et la boustifaille, et la joie,
Le jambon rose au bord tremblant,
Le boudin noir et le vin blanc,
Et les marrons pondus par l’oie.

Et le misérable là-bas
Voit la crèche comme un cabas
Bondé de viande et de ripaille,
Et dans lequel surtout lui plaît
Un beau petit cochon de lait...
C’est l’enfant Jésus sur sa paille.

Noël ! Noël ! Le prêtre dit
Que Dieu parmi nous descendit
Pour consoler le pauvre hère.
Celui-ci voudrait bien un peu
Boire à la santé du bon Dieu ;
Mais Dieu n’a rien mis dans son verre,

Noël ! On ferme. Allons, va-t’en !
Heureux encore si Satan,
Qui chez nous ces jours-là s’égare,
Te fait trouver dans le ruisseau
Quelque os où reste un bon morceau
Et quelque moitié de cigare !

Noël ! Noël ! Les malheureux
N’ont rien pour eux qu’un ventre creux
Qui tout bas grogne comme un fauve,
Si bien que le bourgeois, voyant
Leur oeil dans l’ombre flamboyant,
Au lieu de leur donner, se sauve.
__________________







Ce message a été édité - le 22-12-2019 à 12:37 par Laugierandre


Laugierandre
Membre
Messages : 1920


Posté à 12h34 le 25 Dec 19





Pamphile LEMAY

NUIT DE NOËL

La cloche des beffrois sonne à toute volée...
Sur le flanc des coteaux, au fond de la vallée,
Brûle joyeusement, dans l’âtre des aïeux,
La bûche de sapin. Les maisons s’illuminent.
Courbés sur leur bâton, les vieillards s’acheminent,
Évoquant tour à tour des souvenirs pieux.

On entend tout à coup de glorieux cantiques...
La terre parle au ciel. Et sous les hauts portiques
Des temples merveilleux élevés par la foi,
Et sous le frêle arceau de la pauvre chapelle,
La foule émue accourt. Quel spectacle t’appelle,
Étrange multitude, et d’où vient ton émoi ?

C’est la nuit de Noël !... Nuit calme et parfumée,
Qui berce mollement la lande accoutumée
Au murmure des eaux, au vol des papillons...
C’est la nuit de Noël !... Nuit glacée, éclatante,
Qui s’ouvre sur nos champs comme une immense tente,
Ou les ensevelit dans ses blancs tourbillons.

La foule accourt... Des lieux où le soleil se lève,
Et des lieux où le vent transperce comme un glaive ;
Du midi plein d’arome et du couchant obscur,
La foule accourt, joyeuse en ses habits de fête,
Sous les feux de l’étoile ou malgré la tempête,
Par les chemins de neige ou les clos de blé mûr.

Elle vient saluer le plus grand des mystères.
Dans leurs chants inspirés, les prophètes austères
L’avaient promis. Et siècle après siècle s’en va,
Et, prosterné devant l’humble Vierge Marie,
Tout le monde chrétien adore, chante et prie,
Dans l’amour et la foi, le Fils de Jéhova.

Mais le monde sait-il la nouvelle doctrine ?...
Hommes, priez, jeûnez, frappez-vous la poitrine;
Élevez à Dieu l’âme et domptez l’animal ;
À qui n’a pas de biens donnez un peu des vôtres ;
Soyez humbles et purs; ne doutez point des autres.
Aimez-vous. Pardonnez si l’on vous fait du mal !

Ô chrétiens, croyez-vous à ce Dieu fait poussière ?
À l’éternel Esprit sous cette chair grossière ?
À l’infini pouvoir dans ces débiles mains ?
Croyez-vous à l’amour sans fin et sans mesure ?
Au cœur inassouvi qui rend avec usure ?...
Ô chrétiens, croyez-vous au rachat des humains ?

La cloche des beffrois sonne à toute volée...
Sur le flanc des coteaux, au fond de la vallée,
Brûle joyeusement, dans l’âtre des aïeux,
La bûche de sapin. Les maisons s’illuminent,
Courbés sur leur bâton, les vieillards s’acheminent,
Évoquant tour à tour des souvenirs pieux.

Mais déjà tout bruit meurt sous les voûtes du temple,
L’adorateur s’en va. Le ciel ému contemple
Le flot impétueux des inconstants mortels.
Les cierges sont éteints. Par les fenêtres sombres
On voit quelques rayons se perdre dans les ombres...
C’est la lampe qui veille au milieu des autels.

Les croyants sont partis par des routes diverses,
Et des suggestions habilement perverses,
Comme des traits brûlants traversent les esprits,
Car tout homme est menteur !... La soif des biens s’allume;
Et le cœur, mal gardé, sonne comme une enclume
Aux baisers de l’amour qui l’a déjà surpris.

Et le rêve divin comme un oiseau s’envole !...
Le pauvre porte envie au riche qui le vole ;
L’orgueilleux parvenu méprise l’indigent ;
La bouche qui priait injurie et diffame ;
Le libertin ourdit la chute de la femme,
Et l’avare, à genoux, adore son argent !

Comme un oiseau qui fuit le saint rêve s’efface...
Vers le sol de nouveau l’homme a penché sa face ;
La prière est muette et le cantique dort.
Seuls des cris étouffés du milieu de la foule
Montent encore : les cris des malheureux que foule,
Sous son talon brutal, le lutteur le plus fort !

Ah ! trop tôt le bruit meurt sous les voûtes du temple !
L’adorateur s’en va. Le ciel ému contemple
Le flot impétueux des inconstants mortels.
Les cierges sont éteints. Par les fenêtres sombres
On voit quelques rayons se perdre dans les ombres...
C’est la lampe qui veille au milieu des autels.
__________________

André THEURIET

CARILLONS DE NOËL

Le vieux sonneur monte au clocher,
Jusqu’aux meurtrières béantes
Où les corneilles vont nicher,
Et, chétif, il vient se percher
Au milieu des poutres géantes.

Dans les ténèbres où ne luit
Qu’un falot pendant aux solives,
Il s’agite et mène grand bruit
Pour mettre en danse cette nuit
Les battants des cloches massives.

Joyeuses, avec un son clair,
Les voix des cloches, par le faîte
Des lucarnes, s’en vont dans l’air,
Sur les ailes du vent d’hiver,
Comme des messagers de fête.

Noël ! Noël !... Sur les hameaux
Où les gens rentrent à la brume ;
Sur les bois noirs et sur les eaux
Où tout un peuple de roseaux
Frissonne au lever de la lune ;

Noël !... Sur la ferme là-bas,
Dont la vitre rouge étincelle,
Sur la grand-route où, seul et las,
Le voyageur double le pas,
Partout court la bonne nouvelle...

Oh ! ces carillons argentins
Dans les campagnes assombries,
Quels souvenirs doux et lointains,
Quels beaux soirs et quels doux matins
Ressuscitent leurs sonneries !

Jadis ils me versaient au cœur
Une allégresse chaude et tendre ;
J’ai beau vieillir et passer fleur,
Je retrouve joie et vigueur,
Aujourd’hui, rien qu’à les entendre...

Et cette musique de l’air,
Cette gaîté sonore et pleine,
Ce chœur mélodieux et clair
Qui s’en va dans la nuit d’hiver
Ensoleiller toute la plaine,

C’est l’œuvre de ce vieux sonneur
Qui, dans son clocher solitaire,
Fait tomber, ainsi qu’un vanneur,
Cette semence de bonheur
Sur tous les enfants de la terre.
__________________

Pernette CHAPONNIÈRE

LE SAPIN DE NOËL

Le petit sapin sous la neige
Rêvait aux beaux étés fleuris.
Bel été quand te reverrai-je ?
Soupirait-il sous le ciel gris.
Dis moi quand reviendra l’été !
Demandait-il au vent qui vente
Mais le vent sans jamais parler
S’enfuyait avec la tourmente.
Vint à passer sur le chemin
Un gaillard à grandes moustaches
Hop là ! en deux coups de sa hache,
A coupé le petit sapin.
Il ne reverra plus l’été,
Le petit sapin des montagnes,
Il ne verra plus la gentiane,
L’anémone et le foin coupé.
Mais on l’a paré de bougies,
Saupoudré de neiges d’argent.
Des clochettes de féerie
Pendent à ses beaux rameaux blancs.
Le petit sapin de Noël
Ne regrette plus sa clairière
Car il rêve qu’il est au ciel
Tout vêtu d’or et de lumière.
__________________

Eulalie BOISSONNAULT

NOËL

Noël ! Un chant s’élève éclatant dans la nuit,
Il épand ses flots d’or, vibre, s’épanouit :
Pastorale sacrée !
Les anges l’ont transmis aux bergers anxieux
Et l’univers redit la chorale des cieux :
C’est l’hymne consacrée !

Noël ! La neige met dans les arbres glacés
Un luxe de blancheur, treillis foliacés,
Imitant la guipure ;
Sur l’asphalte, elle étend ses beaux papillons blancs
Et sur les toits hier, obscurs ou rutilants,
Sa gaze la plus pure.

Noël ! La cloche prend son vol joyeux dans l’air,
La lune vaporeuse a des teintes d’éclair,
Un air de chrysanthème ;
Et mille étoiles d’or fleurdelisent le ciel
Humanité, Dieu t’aime !

Noël ! vieux mot d’espoir, d’allégresse et de paix,
Mot qui met en éveil des ferveurs de respects,
Mot qui sonne et convie
À la crèche sacrée où le petit Jésus
Nous apporte des biens que nous n’aurions pas eus
Sans sa terrestre vie.
__________________


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