Vieille pourriture.
par Rousselot
Les eaux troubles du canal sinueux
glissent devant lui tel un serpent silencieux.
Les premiers flocons de l'hiver
dansent autour des réverbères.
Il porte la bouteille à ses lèvres.
L'alcool lui brûle les plaies croutées,
réchauffe un instant son corps, son âme,
lui offrira, cette nuit, des rêves envoutés.
Ils sont froids et humides les quais de Paname.
Jadis, il était jeune, beau et fier.
Il n'avait que mépris pour la misère.
Pour ces chômeurs, ces fainéants,
commensaux, vides poubelles et tire-au-flanc.
Depuis, la grande horloge du temps
a fait son œuvre tranquillement.
Et par une belle journée d'été,
il fut jeté au panier de la prospérité,
remplacé par un clone, plus jeune de trente années.
Épuisé, il a posé la bouteille à ses côtés.
N'a pas pu se lever et dans ses fripes a uriné.
Il sait qu'il est aujourd'hui une veille pourriture
blottit, sans avenir, dans sa vieille couverture.
Poème posté le 03/06/15